RDC : 2e Forum national sur la Décentralisation : Azarias Ruberwa dévoile les grands axes.
l y a plus d’une décennie, l’Etat congolais avait décidé de déconcentrer le pouvoir du Gouvernement central au niveau des provinces et des entités territoriales décentralisées, dans le but de rapprocher l’administration des administrés et booster le développement du pays.
Il est plus que temps aujourd’hui d’effectuer une évaluation afin de savoir si les objectifs ont été atteints et ce qu’il en est de cette grande réforme. C’est la raison d’être du 2ème Forum national sur la Décentralisation qui se tiendra du 11 au 14 décembre 2019 à Kinshasa. Ce mercredi 4 décembre en conférence de presse, le Ministre de la Décentralisation et Réformes institutionnelles, Azarias Ruberwa, a révélé les grands axes de ce que sera cet important évènement. ‘’Le Forum va aller vers la gouvernance locale. Nous allons vérifier si la décentralisation a apporté plus de qualité en matière de bonne gouvernance‘’, a-t-il laissé entendre. Pour Me Azarias Ruberwa , donner des attributions aux provinces pour régler les questions d’agriculture, de santé ou d’éducation en gardant les programmes nationaux dans chacun des secteurs, est une chose. Mais, on n’y arrivera pas si le transfert de ressources ne suit pas.
En fait, le but de ce forum, souligne le Ministre d’Etat, est de voir là où les choses n’ont pas bien marché et proposer des remèdes. ‘’Mais évidemment nous avons l’article 220 de la Constitution, dans son alinéa 2, qui interdit formellement de réduire les prérogatives des provinces et des ETD. Aujourd’hui la conscience collective des dirigeants et de la population, c’est de dire «plus jamais la centralisation du pouvoir». Il faut donner le pouvoir et les prérogatives aux provinces et au niveau le plus bas pour permettre au pays de se développer‘’.
Pour Azarias Ruberwa, il s’agit d’un moment très important après que la décentralisation ait été adoptée par référendum en 2006 et ait effectivement démarré en 2007. ‘’Il est donc temps de vérifier ce qu’il en est de cette grande réforme, si les objectifs ont été atteints ou est-ce qu’il faut faire des «réformes dans la réformes»‘’, a-t-il dit. Il a également précisé que ces réformes doivent êtres accompagnées des sanctions.
Le premier forum sur la Décentralisation a eu lieu en 2007. C’était plutôt un forum de conception. Il a été dégagé un document très important qui fixe en cet acte les dimensions qui devaient être mises en œuvre pour traduire cette réforme.
Au-delà des normes, il est surtout question de l’appropriation de la décentralisation, précise le Ministre en conférence de presse. ‘’Toute réforme doit avoir la population qui s’en approprie. Le Forum vise à savoir s’il y a eu plus de développement depuis la réforme de 2006 ou pas. Avons-nous fait du sur place comme si c’était du temps où l’Etat était géré de façon fortement centralisé ou est-ce qu’il y a des questions de développement que nous avons atteint ?‘’.
Des élections entachées ou corrigeables ?
Le chef de l’Etat et plusieurs autres hautes autorités du pays seront présents. Mais également plus de 600 participants qui viendront de toutes les provinces de la RDC, des experts internationaux et des représentations au niveau de la société civile et de la jeunesse prendront part à ce forum qui, à entendre Azarias Ruberwa, permettra d’évaluer l’architecture institutionnelle issue des élections au sens de la décentralisation. ‘’On va se projeter dans le futur pour les élections urbaines, municipales et locales qui arrivent‘’.
La question des élections provinciales, qui n’ont eu lieu que deux fois en RDC, vaut bien son pesant d’or à l’issue dudit Forum. Il sera question de s’interroger si ces élections se passent bien après qu’il ait été décrié le phénomène de corruption lors des derniers scrutins. Surtout partant du fait qu’ils engendrent aussi bien les sénateurs que les gouverneurs et vice-gouverneurs de provinces. ‘’Il est important de savoir si les dirigeants, à ce niveau là, sont issus des processus entachés ou des processus corrigeables‘’, assure le Ministre d’Etat.
Et, bien entendu, cette question récurrente de l’instabilité au niveau des provinces avec des gouverneurs qui partent à quelques mois du début de leurs fonctions. Les procédures sont-elles respectées ? Y a-t-il des rapports de gestion ou c’est des questions sentimentales et comment les résoudre ?
Ces préoccupations seront toutes examinées pendant 4 jours à travers le Ministère de la Décentralisation qui est l’instrument par lequel le Gouvernement veut organiser ce deuxième Forum.
Equilibre de développement
Il est important de savoir qu’il y a deux axes qui constituent la décentralisation. Il s’agit du transfert des compétences et le transfert de ressources. ‘’C’est bien bon de donner des attributions aux provinces pour régler les questions d’agriculture, de santé ou d’éducation en gardant les programmes nationaux dans chacun des secteurs, mais vous n’y arriver pas si vous n’avez pas fait le transfert de ressources. Ce qui suppose qu’il y a 40% rétrocédées dans les provinces‘’, martèle le Ministre.
Il y a également la nomenclature des taxes, impôts et autres redevances qui permet aux provinces et aux ETD d’avoir la capacité légale de collecter les taxes et les impôts. Ce qui devrait les aider, en plus des 40% de rétrocession, à faire de leurs budgets des budgets importants pour régler les problèmes de la population.
Aussi, certaines nouvelles matières telles que la redevance minière avec la loi de 2018 qui permet à ce que les ETD où sont extraits les minerais, bénéficient de 15% ou encore de 0,3% du chiffre d’affaire pour ce qui est des projets communautaires.
Sans oublier la caisse nationale de péréquation qui est du domaine de financement de la décentralisation. ‘’Cette caisse qui va véritablement démarrer son programme à partir du mois de janvier parce que le budget est en discussion au niveau du Parlement, va devoir retenir 10% du budget national. C’est un montant très important, plus de 600.000 USD. Cet argent va aider les provinces et les ETD, par solidarité nationale, à avoir une sorte d’équilibre de développement‘’, insiste-t-il.
Il est clair que selon lui, il ne faut pas qu’il y ait des provinces, villes et communes qui soient très riches, et d’autres extrêmement pauvres. Cela va réguler à partir du principe de l’inversion. ‘’Ceux qui reçoivent plus comme rétrocession sur les 40%, recevront plutôt moins lorsqu’il s’agira de la caisse nationale de péréquation. C’est cela la solidarité nationale‘’.
Les prémisses de la décentralisation
Pendant plusieurs décennies, la RDC a évolué sous un mode de gestion qui était la forte centralisation du pouvoir. Azarias Ruberwa a révélé que ‘’les dirigeants ont pensé qu’ils pouvaient atteindre le développement d’un sous-continent comme celui-ci à partir de Kinshasa. Il s’est avéré en 2006 que ceci n’était pas possible‘’.
Déjà les prémisses, quoi que timides, de la décentralisation, se sont illustrées vers les années 1988 lorsque le Kivu a dégagé trois provinces dont le Nord, le Sud et le Maniema. En 2006, cependant, reprenant une des résolutions de la Conférence nationale souveraine qui ramenait les provinces de 11 à 26, ce mode de gestion s’est avéré être le plus approprié.
Il fallait un changement radical de gestion du pays et respecter les prescrits de la Constitution qui indique 3 niveaux. Ainsi, il y a le niveau central, provincial et celui des entités territoriales décentralisées (ETD) qui, dans le cadre de notre législation sont la ville, la commune, et au niveau plus local, le secteur et la chefferie.
Par contre, les entités déconcentrées qui sont restés dans le domaine de la territoriale sont le territoire, le groupement et le village. ‘’Le législateur a donc voulu fixer le développement à travers l’exercice du pouvoir au niveau central, de la province et des ETD‘’.
La Pros.
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