Serigne Guèye Diop, maire de Sandiara : « 20 000 emplois sont attendus dans la zone économique »

Serigne Guèye Diop, maire de Sandiara : « 20 000 emplois sont attendus dans la zone économique »

Monsieur le maire, comment se porte la commune de Sandiara ?

La commune de Sandiara avance à pas de géant. Nous avons fait des progrès assez importants dans la conception de l’ensemble des projets. Nous avons affiné le diagnostic de tous les projets.
Et maintenant, nous sommes dans la phase réalisation et résultats. Nous avions identifié, en 2012-2014, de grands défis dont le chômage des jeunes, la question de la pauvreté, l’encadrement des femmes, les faibles rendements agricoles. Après avoir mis en place le Plan Sandiara émergent en 2015, nous avons choisi 10 projets qui sont devenus, à la longue, 15 projets. Et aujourd’hui, nous avons ficelé un package de 25 projets qui sont la solution la plus efficace pour faire face aux défis. A mi-parcours, le bilan est particulièrement positif.

Quelles sont les actions concrètes réalisées grâce à la version locale du Pse que vous aviez lancée en 2015 ?

Le Plans Sandiara émergent est une version locale du Plan Sénégal émergent. On a exactement les mêmes axes : l’éducation et le capital humain et la restructuration de l’économie à travers les zones économiques spéciales. Sandiara est l’une des rares communes qui disposent d’une zone et qui la gère avec l’Etat. Les projets élaborés sont en train d’être exécutés. Je suis très attaché à l’éducation et à la formation des jeunes. Je suis convaincu que le capital humain est le facteur le plus important pour atteindre les objectifs du Plan Sénégal émergent et du Plan Sandiara émergent. Nous souhaitons que 95% des jeunes de la population de Sandiara sachent lire et écrire, avoir un métier et aller à l’université ou au lycée technique. C’est notre principale stratégie, parce que quand on n’aura pas 95% de la population bien formés, on ne pourra pas réussir notre ambition. Avec cette vision, nous avons commencé à remplacer tous les abris provisoires. Aujourd’hui, nous sommes à plus de 15 salles de classe construites dans la commune de Sandiara. Notre objectif est d’ici à 2019, avoir zéro abri provisoire. Nous avons 30 écoles primaires dans les communes avec des cycles complets et des cycles incomplets. Quand je suis arrivé en 2015, il y avait une douzaine d’abris provisoires. En 2002, j’avais construit le collège de Sandiara qui, très rapidement, est arrivé 3 000 élèves de la 6ème à la terminale. En 2012, nous l’avons offert à l’Etat du Sénégal. Mais ce qui manquait est qu’il y avait 30 autres villages de la commune qui étaient assez éloignés de Sandiara. Ce qui fait que l’offre d’enseignement secondaire n’était pas suffisante. Nous avons pris le défi de construire d’autres collèges à l’intérieur de la commune. Le plus grand lycée technique professionnel du pays construit par le président, Macky Sall, avec le ministère de la Formation professionnelle est en train d’être finalisé. Il sera inauguré l’année prochaine pour former, au moins, 1500 jeunes chaque année. Ce lycée va parachever le schéma d’achèvement pour permettre à chaque jeune qui arrive en troisième d’avoir deux options : aller vers l’enseignement classique pour avoir le Bac ou faire l’enseignement professionnel. Dans le domaine universitaire, nous avons fait le pari d’avoir le maximum de bacheliers. Cette année, nous sommes à 1 000 bacheliers dans la commune. Dans 10 ans, nous aurons plus de 3500 à 4000 bacheliers dans la commune de Sandiara et peut-être 1500 Cap ou Bts. Nous allons atteindre une masse critique de cadres et de techniciens qui vont porter le développement de la commune.
L’économie est aussi un pilier important dans le Plan Sandiara émergent. Il est fréquent de trouver des gens qui ont un diplôme et qui peinent à trouver du travail. Nous avons choisi de créer des lieux de travail. Ainsi, nous avons lancé deux grands projets : la zone économique spéciale de Sandiara. Le chef de l’Etat a bien voulu créer cette zone et signé le décret le 22 novembre 2018. Cette zone qui fait 100 hectares pourra abriter 50 à 60 entreprises. Elle va créer entre 10 000 emplois directs et 20 000 emplois directs et indirects d’ici à 10 ans. Aujourd’hui, cette zone embauche déjà 300 jeunes qui viennent travailler tous les jours dans les trois usines installées. Une dizaine d’usines vont s’installer très prochainement. Sur le carnet d’enregistrement et de réservation, nous sommes à 32 usines. Certaines ont déjà leur permis de construire. D’autres sont déjà agréées par l’Apix. Ce volet emploi a été l’un des gros défis que nous avions identifiés lors du diagnostic du Plan Sandiara émergent. Maintenant, nous pensons que dans les 3 ans qui viennent, nous pourrons dépasser la barre des 5 000 emplois. Et dans les 5 ans qui viennent, nous allons dépasser la barre des 10 000 emplois directs.
Cela va régler la question du chômage et créer une nouvelle dynamique de nouveaux employeurs et de nouveaux consommateurs. Les populations auront un pouvoir d’achat qui va attirer le commerce et la construction de villas. Notre ambition est d’offrir, à chaque jeune né à Sandiara, la possibilité d’y étudier, d’y apprendre un métier et d’y rester pour travailler. Le lien entre le capital humain et la zone économique spéciale est un facteur d’attractivité. Le lycée technique va non seulement former 1500 jeunes, mais il va également former les jeunes qui vont travailler dans la zone industrielle. La zone va accueillir les élèves des lycées techniques. Toute entreprise qui s’installe à Sandiara, va prendre une dizaine d’apprentis pendant 3 ans.

Les entreprises interviennent dans quels domaines ?

Elles sont principalement dans le domaine agro-alimentaire. L’avantage d’avoir des usines est que vous pouvez transformer tout ce qui est produit en haute valeur ajoutée. Nous avons une usine dans le domaine halieutique. Une autre qui intervient dans la production d’aliments de bétail. Des usines de sardines vont venir. Il y a aussi beaucoup de demandes dans le domaine de l’abattage de la volaille et du bovin. Nous avons une forte demande dans le domaine de la chimie. Il y a des usines d’engrais qui arrivent. Des usines qui produisent des produits pour les piscines, dans le domaine du bâtiment et les textiles et de la tannerie.

Comment la mobilisation des entreprises a été possible ?

Je suis du monde de l’industrie pour avoir fait 25 ans au sommet en Suisse et dans d’autres localités à travers Nestlé. Cela m’a permis d’avoir une connaissance assez approfondie des besoins des industriels. Les missions à travers le monde m’ont permis d’avoir un bon carnet d’adresses et savoir ceux qui investissent, mais surtout arriver à comprendre l’adéquation entre les besoins en développement et les besoins des investisseurs qui sont à la recherche d’argent. Il faut partir des intérêts individuels à des intérêts mutuels. Nous sommes partis, il y a quelques années, à New York, pour rencontrer des amis, nous avons ouvert un bureau pour vendre la destination Sandiara. Nous avons fait la même chose à Paris et au Maroc. Ces initiatives commencent à payer.

Il y a aussi un volet important, la crédibilité. Quand ces entreprises viennent, elles ont besoin d’être accueillies, comprises et accompagnées. Elles ont besoin aussi d’un code d’éthique. Il y a zéro corruption à Sandiara. Il est interdit de donner de l’argent pour des faveurs pour des terres. Il y a beaucoup d’entreprises qui sont venues sans qu’on aille les démarcher parce qu’elles ont été dans d’autres zones et on leur a demandé de l’argent. L’autre volet est la cohérence des programmes. Un investisseur cherche des conditions financières très basses, des taxes les plus basses, une main d’œuvre qualifiée. Nous avons réuni ces conditions à Sandiara. Nous sommes à 60 km de Thiès, à 100 km de Dakar qui a les meilleures universités du pays. Nous travaillons aussi avec l’Apix et l’Aprosi. Le gouvernement a déjà une stratégie de communication internationale pour vendre la destination Sénégal. Nous avons aussi un marketing territorial pour vendre notre localité. Nous insistons sur la situation géographique, la qualité des sols qui sont les meilleurs, la station de Saly, l’autoroute à péage pour attirer les investisseurs. Nous voulons arriver à un label Sandiara avec un slogan : « osez investir à Sandiara ».

Les emplois ne sont pas exclusivement réservés aux jeunes de Sandiara…
Nous avons 12 agropoles dans le domaine de la production maraîchère. Ce sont des projets qui permettent, d’une part, de produire les matières premières, mais aussi de créer une dynamique économique, d’autre part. A terme, nous voulons créer 30 agropoles pour fixer les jeunes et les femmes et permettre aux populations de manger mieux. Dans les agropoles, les femmes gagnent entre 2500 Fcfa et 3000 Fcfa. Ces agropoles sont une solution contre l’émigration et l’exode rural. Maintenant, on voit des jeunes issus des autres localités venir chercher du travail à Sandiara. La plupart des jeunes de Sandiara sont à l’école. Dès qu’on atteindra 2000 emplois, on ne pourra plus trouver des travailleurs à Sandiara. D’autres vont forcément venir travailler.

C’est donc totalement ouvert.

Quel impact la mise en œuvre du Pse a sur les recettes de la mairie ?
Notre budget est passé de 60 millions en 2013 à 1,4 milliard de FCfa aujourd’hui. L’essentiel de cet argent vient de redevances dont les plus importantes sont les redevances industrielles et les droits d’entrée. Il y a aussi l’impôt sur les salaires sans compter la contribution locale pour les communes. C’est pour cette raison que nous avons décidé d’encourager l’emploi dans cette zone.
La commune peut maintenant aller vers les banques pour apporter 10% pour construire des hlm, un marché et avoir un patrimoine réel qui lui permet de ne plus tout attendre de l’Etat.

D’une manière générale, que doivent donc faire nos communes pour être attractives ?

Il faut d’abord faire un diagnostic. Il faut comprendre le phénomène auquel on fait face et ses causes. Il ne s’agit pas de monographie. Il faut aller beaucoup plus loin. Il faut voir ce que la commune a comme force et ce qu’elle a comme faiblesse. Cela permettra d’identifier les opportunités, les faiblesses et les risques. A partir de ces étapes, il faut faire une priorisation des solutions. Il s’agit donc de transformer sous forme de projets interdépendants et faire des forums impliquant tous les acteurs de la population. Il faut donc créer des bureaux d’accueil dans les mairies et un plan d’occupation des sols.

Pensez-vous que le Plan Sénégal émergent qui a guidé le Plan Sandiara émergent peut réussir ?

Si vous regardez chacun de ses axes, le Pse est assurément sur la bonne voie. Si vous regardez l’axe I qui est la restructuration de l’économie, nous sommes à 1 000 mégawatts en matière d’énergie. Si vous voulez développer l’économie, il faut d’abord maîtriser l’énergie. La politique industrielle est marquée par une incitation fiscale, la création de zones économiques spéciales.
Notre croissance est l’une des meilleures en Afrique. D’ici à 5 ans, on aura une croissance à deux chiffres avec notamment le pétrole et le gaz. Le Pse est en train de faire des pas de géants.

Dans le domaine des infrastructures, nous avons l’aéroport Blaise Diagne, le pôle de Diamniadio, les routes… Dans le domaine de l’agriculture, la riziculture fait des pas de géants. Il faut que les Conseils départementaux et municipaux puissent développer des mini Pse. Le capital humain est aussi important. Le président a mis en œuvre une politique de construction d’universités et de formation professionnelle. Diamniadio est un nouveau concept comme Brasilia au Brésil ou Abuja au Nigéria. Sortir un million de personnes de Dakar est une décision courageuse. Cela crée une nouvelle dynamique. Sur la gouvernance, nous avons les meilleures notations. On ne peut jamais dire que tout est parfait, mais l’essentiel est d’avoir des résultats concrets et d’avancer.

Le Soleil

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